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NUMA POMPILIUS ET LA NYMPHE ÉGÉRIE

 

NUMA POMPILIUS, POUR DONNER DES LOIS À ROME , ÉCOUTE LES CONSEILS DE LA NYMPHE ÉGÉRIE

Numa Pompilius est né le jour de la fondation de Rome par Romulus. Il lui succéda en -714. Créateur de la plupart des cultes et des institutions sacrées, il disait que sa politique lui était inspirée par la nymphe Égérie qui le visitait la nuit dans une grotte, près d'une source sacrée. On dit même qu'il en fit son épouse. Elle le conseillait régulièrement sur sa politique religieuse, lui apprenant les prières et les conjurations efficaces. Leurs rencontres nocturnes avaient lieu près d'une source située dans un bois sacré de Rome, au pied de la colline du Caelius, près de la porte Capène.

Selon Ovide, après la mort de Numa Pompilius, Égérie, inconsolable, se réfugia dans le bois d'Aricie; elle y versa tant de larmes qu'elle fut transformée en source par Diane dont elle avait interrompu le culte par ses lamentations

Esquisses par Léon COGNIET (1794-1880) pour le décor de la troisième salle du Conseil d'État au Louvre. Salon de 1827.

Cogniet a représenté Numa dans une grotte, au pied d'une statue de la nymphe Égérie,
attendant que lui soient dictées les lois attendues par les Romains.


OVIDE, Métamorphoses, XV, 480-492
In patriam remeasse ferunt ultroque petitum
accepisse Numam populi Latialis habenas.
Conjuge qui felix nympha ducibusque Camenis
sacrificos docuit ritus gentemque feroci
assuetam bello pacis traduxit ad artes.
Qui postquam senior regnumque aevum peregit,
extinctum Latiaeque nurus populusque patresque
deflevere Numam; nam conjux, urbe relicta,
vallis Aricinae densis latet abdita silvis
sacraque Oresteae gemitu questuque Dianae
impedit. A! quotiens nymphae nemorisque lacusque,
ne faceret, monuere et consolantia verba
dixerunt!
Numa retourna dans sa patrie et, appelé par les voeux du peuple latin, il prit en main les rênes de l'État. Heureux époux d'une nymphe, guidé par les Camènes, il enseigna à ses sujets les rites des sacrifices et il tourna une nation farouche et belliqueuse vers les arts de la paix. Lorsque, chargé d'ans, arrivé au terme d'un long règne et d'une longue existence, Numa s'éteignit, il fut pleuré par les matrones du Latium, par le peuple et par le sénat; car son épouse, ayant quitté la ville, était allée cacher sa douleur sous les épais ombrages de la vallée d'Aricies, où ses plaintes et ses gémissements troublaient le culte de Diane établi par Oreste. Ah! que de fois les nymphes du bois et du lac l'engagèrent à se calmer et lui adressèrent des paroles de consolation!

 

OVIDE, Fastes, III, 275-284
Egeria est quae praebet aquas, dea grata Camenis:
illa Numae coniunx consiliumque fuit.
Principio nimium promptos ad bella Quirites
molliri placuit iure deumque metu.
Inde datae leges, ne firmior omnia posset,
coeptaque sunt pure tradita sacra coli.
Exuitur feritas, armisque potentius aequum est,
et cum ciue pudet conseruisse manus,
atque aliquis, modo trux, uisa iam uertitur ara
uinaque dat tepidis farraque salsa focis.
C'est à Égérie qu'appartiennent ces ondes: Égérie, nymphe chérie des Muses, l'épouse et l'oracle de Numa. C'était le temps où il fallait enfin soumettre au frein de la justice et retenir par la crainte des dieux ces Romains toujours prêts à saisir les armes; les lois sont proclamées et remplacent le droit du plus fort; alors les divinités des ancêtres deviennent l'objet d'un culte solennel. La barbarie disparaît peu à peu; l'équité succède à la violence; le citoyen rougit de combattre contre un citoyen, et tel qui, furieux, allait assouvir sa colère, s'apaise soudain, à l'aspect de l'autel, et vient jeter sur la flamme le vin, le sel et le froment.

 

PLUTARQUE, Vie de Numa, 142
Αὕτη μὲν οὖν λέγεται τρίτῳ καὶ δεκάτῳ μετὰ τὸν γάμον ἔτει τελευτῆσαι. Ὁ δὲ Νομᾶς ἐκλείπων τὰς ἐν ἄστει διατριβὰς ἀγραυλεῖν τὰ πολλὰ καὶ πλανᾶσθαι μόνος ἤθελεν, ἐν ἄλσεσι θεῶν καὶ λειμῶσιν ἱεροῖς καὶ τόποις ἐρήμοις ποιούμενος τὴν δίαιταν. Ὅθεν οὐχ ἥκιστα τὴν ἀρχὴν ὁ περὶ τῆς θεᾶς ἔλαβε λόγος, ὡς ἄρα Νομᾶς ἐκεῖνος οὐκ ἀδημονίᾳ τινὶ ψυχῆς καὶ πλάνῃ τὸν μετὰ ἀνθρώπων ἀπολέλοιπε βίον, ἀλλὰ σεμνοτέρας γεγευμένος ὁμιλίας καὶ γάμων θείων ἠξιωμένος, Ἠγερίᾳ δαίμονι συνὼν ἐρώσῃ καὶ συνδιαιτώμενος, εὐδαίμων ἀνὴρ καὶ τὰ θεῖα πεπνυμένος γέγονεν. Tatia était morte, dit-on, après treize ans de mariage. Numa, depuis sa mort, avait quitté le séjour de la ville, et, d'ordinaire, il habitait la campagne. Son plaisir était de se promener solitaire dans les bocages des dieux, dans les prairies consacrées, et dans les lieux déserts. C'est ce genre de vie qui donna, je pense, l'occasion au bruit de son commerce avec une déesse : on imagina que ce n'était ni la mélancolie ni la douleur qui portaient Numa à fuir le commerce des hommes ; qu'il avait trouvé une société plus auguste ; qu'une divinité l'avait jugé digne de son alliance, et qu'époux de la déesse Égérie, comblé des dons de son amour, il était devenu, en passant ses jours auprès d'elle, un homme heureux, et savant dans la connaissance des choses divines.

 

LACTANCE, Les Institutions divines, livre I, chap. 22.
Harum vanitatum apud Romanos auctor et constitutor Sabinus ille rex fuit, qui maxime animos hominum rudes atque imperitos novis superstitionibus implicavit: quod ut faceret aliqua cum auctoritate, simulavit cum dea Egeria nocturnos se habere congressus. Erat quaedam spelunca peropaca in nemore Aricino, unde rivus perenni fonte manabat; huc, remotis arbitris, se inferre consueverat, ut mentiri posset, monitu deae conjugis ea sacra populo se tradere quae acceptissima diis essent. Celui qui commença à introduire dans Rome des vaines superstitions fut Numa Pompilius, son second roi, qui, trouvant des esprits grossiers et susceptibles de toutes sortes d'impressions, se servit de cette disposition pour leur inspirer ce qu'il voulut touchant le culte des dieux. Et, pour le faire avec plus d'autorité et de succès, il feignit qu'une certaine nymphe Égérie lui révélait de hauts mystères dans les entretiens qu'il avait avec elle durant la nuit. Assez proche de Rome dans un bois étais, se voit un antre obscur et profond d'où sort une eau claire et pure qui va arroser le pied des arbres voisins: c'est là que Numa passait les nuits sans témoins et, sortant les matins de sa retraite, il annonçait au peuple ce qu'il avait appris de son épouse immortelle, de la manière dont les dieux voulaient être servis.

Pour comparaison:

Ulpiano Checa y Sanz (1860-1916)
La Nymphe Égérie dictant les lois de Rome à Numa Pompilius, Museo de Madrid


NUMA EST LE CRÉATEUR DE L'INSTITUTION DES VESTALES.

Toute vestale qui avait violé son voeu de virginité était enterrée vivante dans une sorte de caveau.

Plutarque, Vie de Numa
Κόλασις δὲ τῶν μὲν ἄλλων ἁμαρτημάτων πληγαὶ ταῖς παρθένοις, τοῦ μεγίστου Ποντίφικος κολάζοντος ἔστιν ὅτε καὶ γυμνὴν τὴν πλημμελήσασαν, ὀθόνης ἐν παλινσκίῳ παρατεινομένης· ἡ δὲ τὴν παρθενίαν καταισχύνασα ζῶσα κατορύττεται παρὰ τὴν Κολλίνην λεγομένην πύλην· ἐν ᾗ τις ἔστιν ἐντὸς τῆς πόλεως ὀφρὺς γεώδης παρατείνουσα πόρρω· καλεῖται δὲ χῶμα διαλέκτῳ τῇ Λατίνων. Ἐνταῦθα κατασκευάζεται κατάγειος οἶκος οὐ μέγας, ἔχων ἄνωθεν κατάβασιν. Κεῖται δὲ ἐν αὐτῷ κλίνη τε ὑπεστρωμένη καὶ λύχνος καιόμενος, ἀπαρχαί τε τῶν πρὸς τὸ ζῆν ἀναγκαίων βραχεῖαί τινες, οἷον ἄρτος, ὕδωρ ἐν ἀγγείῳ, γάλα, ἔλαιον, ὥσπερ ἀφοσιουμένων τὸ μὴ λιμῷ διαφθείρειν σῶμα ταῖς μεγίσταις καθιερωμένον ἁγιστείαις. Αὐτὴν δὲ τὴν κολαζομένην εἰς φορεῖον ἐνθέμενοι καὶ καταστεγάσαντες ἔξωθεν καὶ καταλαβόντες ἱμᾶσιν, ὡς μηδὲ φωνὴν ἐξάκουστον γενέσθαι, κομίζουσι δι´ ἀγορᾶς. Ἐξίστανται δὲ πάντες σιωπῇ καὶ παραπέμπουσιν ἄφθογγοι μετά τινος δεινῆς κατηφείας· οὐδὲ ἐστὶν ἕτερον θέαμα φρικτότερον, οὐδ´ ἡμέραν ἡ πόλις ἄλλην ἄγει στυγνοτέραν ἐκείνης. Ὅταν δὲ πρὸς τὸν τόπον κομισθῇ τὸ φορεῖον, οἱ μὲν ὑπηρέται τοὺς δεσμοὺς ἐξέλυσαν, ὁ δὲ τῶν ἱερέων ἔξαρχος εὐχάς τινας ἀπορρήτους ποιησάμενος καὶ χεῖρας ἀνατείνας θεοῖς πρὸ τῆς ἀνάγκης, ἐξάγει συγκεκαλυμμένην καὶ καθίστησιν ἐπὶ κλίμακος εἰς τὸ οἴκημα κάτω φερούσης. Εἶτα αὐτὸς μὲν ἀποτρέπεται μετὰ τῶν ἄλλων ἱερέων· τῆς δὲ καταβάσης ἥ τε κλίμαξ ἀναιρεῖται καὶ κατακρύπτεται τὸ οἴκημα γῆς πολλῆς ἄνωθεν ἐπιφορουμένης, ὥστε ἰσόπεδον τῷ λοιπῷ χώματι γενέσθαι τὸν τόπον. Οὕτω μὲν αἱ προέμεναι τὴν ἱερὰν παρθενίαν κολάζονται. Pour les fautes qu'elles-mêmes commettent, les Vestales sont frappées de verges par le grand Pontife ; quelquefois môme elles subissent le châtiment dans un lieu obscur et retiré, nues et protégées d'un simple voile. Mais la vestale qui a violé le vœu de virginité est enterrée vivante, près de la porte Colline. Il y a, dans cet endroit, en dedans de la ville, un tertre d'une assez longue étendue, qu'en langue latine on appelle une levée. On y construit un petit caveau, où l'on descend par une ouverture pratiquée à la surface du terrain. Il y a, dans le caveau, un lit, une lampe allumée, et une petite provision des choses nécessaires à la vie : du pain, de l'eau, un pot de lait et un peu d'huile, comme pour dissimuler qu'on force à mourir de faim une personne consacrée par les plus augustes cérémonies. Celle qui a été condamnée est mise dans une litière, qu'on ferme exactement, et qu'on serre avec des courroies, de manière que sa voix ne puisse pas morne être entendue; et on lui fait traverser le Forum. Alors tout le monde se range, et suit d'un air morne et dans un profond silence. Il n'est point de spectacle plus effrayant à Rome, point de jour où la ville présente un plus lugubre aspect. Quand la litière est apportée au lieu du supplice, les licteurs délient les courroies. Le grand Pontife, avant l'exécution, fait certaines prières secrètes, et il lève les mains au ciel. Il tire ensuite de la litière la patiente couverte d'un voile, la met sur l'échelle par où l'on descend dans le caveau, puis il s'en retourne avec les autres prêtres. Elle arrivée au bas, on remonte l'échelle, et l'on recouvre le caveau, en y amoncelant de la terre jusqu'à ce que le terrain soit de niveau avec le reste de la levée. Tel est le châtiment des Vestales qui ont violé leur vœu sacré de virginité

MBAO-447

Jacques GAMELIN (1738-1803), Le supplice d'une vestale

(voir abbé Nadal, Histoire des Vestales, 1725, p. 170-171)


LA GROTTE DE LA NYMPHE ÉGÉRIE

Dans la mythologie romaine, Égérie était une nymphe des sources, une camène. Elle était associée au culte de la Diane de Némi, dans le bois d'Aricie, et considérée comme la déesse des femmes.

A Rome, un nymphée du +IIe siècle, dans la propriété (dite Tropius) d'Hérode Atticus (un grec devenu sénateur romain), reçut le nom de "Grotte d'Égérie"

MBAO-2008.0.1228

Herman Van SWANEVELT (1600-1655), Grotte de la nymphe Égérie

 

Google-maps

L'état actuel dans le parc de la Caffarella, à Rome

L'édifice a été remanié au début du +IVe siècle. ll se trouve aujourd'hui à Rome dans le parc de la Caffarella, près de la rivière Almone.
Le monument a été sculpté artificiellement dans le flanc de la colline. Il se présente comme un nymphée rectangulaire, avec une grande niche au fond et trois niches plus petites sur les côtés, dans lesquelles étaient placées des statues de dieux de la rivière d'où coulait de l'eau minérale, provenant d'une source située en contrebas via. Aujourd'hui, une statue masculine semi-allongée est conservée dans la niche au fond d'où jaillit de l'eau; elle représente peut-être le dieu Almone.
Les murs de la pièce étaient à l'origine recouverts de dalles de marbre blanc et vert et de mosaïque en pâte de verre de différentes couleurs, tandis que le toit voûté en berceau, recouvert de pierre ponce, simulait l'intérieur d'une grotte naturelle.
Le nymphée donnait à l'origine sur la rivière avec un quadriportique, non conservé, qui délimitait un bassin de collection rectangulaire, qui à son tour menait à un bassin lacustre plus grand, peut-être à identifier dans le "Lacus Salutaris" connu de sources anciennes, là où coulaient les eaux de la rivière Almone.


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