CLÉMENCE ET WALDÉMAR OU LE PEINTRE PAR AMOUR
drame
Personnages :
.
M. de MERFORT, vieux marin, veuf, ancien officier attaché au service de la Compagnie des Indes
CLÉMENCE, fille de M. de Merfort, épouse de Waldémar.
WALDÉMAR, époux de Clémence, au château sous le nom de VOLNEY.
URBAIN, fils de Clémence et de Waldémar, 6 ans.
SIMON, fidèle valet de chambre de M. de Merfort, 60 ans; son maître lui a fait cadeau d'une métairie qu'il a revendue.
Mlle BERTHE, femme de charge dans le château, 50 ans; espérant obtenir une rente de son maître, elle fait du zèle et se mêle de tout.
La scène se passe dans le château de M. de Merfort, à dix lieues de Paris.
Pendant son dernier voyage aux Indes de M. de Merfort, sa fille Clémence, alors confiée à une tante, s'est mariée, sans le consentement de son père, avec un jeune lieutenant et est partie avec lui, sans plus donner de ses nouvelles. M. de Merfort sait seulement que le mari s'appelle Waldémar et qu'ils habitent La Haye. Depuis plus de six ans, il souffre et attend en vain une lettre de sa fille.
Clémence et son mari ont eut très vite un fils, Urbain. Le vieux valet de chambre de M. de Merfort, Simon, est resté en contact avec eux et, pour les aider il a vendu une métairie dont son maître lui avait fait cadeau.
Pour se changer les idées, M. de Merfort a décidé de faire décorer quatre lambris de son nouveau salon et il a envoyé Simon à Paris avec mission de trouver un artiste peintre. Comme Simon sait fort bien où vivent Clémence, son mari et leur enfant, le petit Urbain, il va en profiter pour ourdir un stratagème permettant de rapprocher le père et la fille. Pour cela il a demandé à Waldémar de peindre une toile représentant Clémence et Urbain et de venir avec sa femme et son fils dans une auberge près du château de Merfort.
*
Quand la pièce commence, Simon revient de Paris, annonçant qu'il a trouvé un peintre, un certain Volney, qui devrait faire l'affaire. Ce peintre, dit-il, est venu avec un grand tableau qu'il cherche à vendre. Merfort le rencontre, l'apprécie et l'embauche : Simon fera en sorte qu'il puisse loger au château.
Waldémar, Clémence et le petit Urbain s'installent discrètement dans une salle basse du château. Malheureusement, Mlle Berthe a vu Clémence à une fenêtre. Comme celle-ci refuse de dire qui elle est, Mlle Berthe, la considérant comme une intruse, veut la chasser ou du moins révéler sa présence à Merfort. Simon doit se fâcher et la menacer d'être renvoyée pour obtenir qu'elle se taise.
Quand Merfort vient voir "Volney" dans son logement, Clémence et Urbain ont le temps se cacher dans une autre pièce. Dans leur conversation, Merfort apprend que "Volney" a passé quelques mois à La Haye. Il lui demande alors s'il n'y aurait pas connu une "madame Waldémar". "Volney" lui répond qu'il était intimement lié avec son époux. Comme Merfort se déchaîne contre ce monstre qui l'a privé de sa fille chérie, "Volney" essaie de plaider la cause de son ami. Mais Merfort ne veut rien entendre et maudit sa fille. En entendant cela, Clémence, qui écoutait derrière la porte, pousse un grand cri. "Volney" reconnaît qu'il est venu en France avec son épouse et son fils et que c'est un cri de l'enfant qu'il a entendu. Alors il va chercher Urbain et le présente à Merfort, qui l'embrasse et qui, bien sûr, demande où est sa mère. – Elle va venir, répond "Volney", pour gagner du temps. Clémence, cachée dans la pièce voisine, redoute la colère de son père quand il saura que ce "Volney" est ce séducteur duquel il a juré de tirer vengeance; le vieux Simon essaie, non sans mal, de lui redonner confiance.
Dans le grand salon du château Volney a installé son tableau et l'a recouvert d'une toile. Mais les choses se compliquent : Mlle Berthe, sentant qu'il se passe quelquechose, vient à nouveau gêner la mise en place du plan du vieux Simon; de plus Merfort vient de décider de faire venir son notaire pour deshériter sa fille. Ne parvenant pas à l'en dissuader, Simon reconnaît qu'il sait où est Clémence, mais refuse de le dire. Furieux, son maître le chasse, en lui offrant toutefois une bourse, que Simon refuse. D'ailleurs Mortfert a décidé de quitter la France et il demande à "Volney" de partir, puisqu'il n'est plus question de décorer le nouveau salon du château; pour le dédommager, il lui achètera son tableau plus cher que sa valeur. Auparavant toutefois, il demande à voir l'épouse du peintre, qu'il n'a toujours pas rencontrée.
C'est alors que le facteur apporte une lettre de Clémence. Trop ému pour le faire lui-même, Merfort demande à "Volney" de lire la lettre dans laquelle sa fille dit avoir mille remords de ce qu'elle a fait et demande à son père de rentrer en grâce. Par cette lettre, il apprend que la mère de Waldémar a déjà pardonné à son fils et qu'elle lui a rendu sa fortune. En entendant les phrases suppliantes de sa fille, Merfort pleure, mais ne cède toujours pas.
Alors "Volney" dévoile son tableau : il représente Clémence avec le petit Urbain, et Merfort reconnaît l'enfant qu'il a rencontré et embrassé. Lorsque "Volney" avoue que c'est lui qui a séduit Clémence, Merfort, furieux, le menace de son épée en criant : "Où est ma fille?". Alors Waldémar fait glisser la toile du tableau, derrière lequel Clémence et Urbain se sont placés dans la même attitude où il ont été peints : dans le cadre M. de Merfort, stupéfait, voit sa fille et son petit-fils et non plus leur image.
Clémence se jette alors aux pieds de son père et Waldémar, à genoux, lui présente l'enfant. Après quelques dernières réticences, Merfort se laisse attendrir, d'abord par l'enfant, puis par sa fille, enfin par "Volney" redevenu Waldémar. Tout s'arrange alors:
– Mlle Berthe est pardonnée, malgré sa curiosité et ses bavardages.
– M. de Merfort gardera Simon non plus comme valet de chambre, mais comme ami, avec mille écus de pension (la lecture de la lettre lui a appris qu'il avait vendu la métairie qu'il lui avait donnée)
– Enfin le notaire appelé pour deshériter Clémence va maintenant pouvoir établir son contrat de mariage avec Waldémar.
Et c'est Clémence qui tire la morale de cette intrigue : "Puisse notre exemple prouver aux enfants qu'ils ne doivent jamais oublier leur devoir, qu'il n'est de bonheur que dans l'estime de soi-même et combien il est dangereux d'offenser un bon père".