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Charles Barbara

L'OFFICIER D'INFANTERIE DE MARINE


 

RÉSUMÉ :

À Orléans, Valentin et Bernard ont été amis depuis l'âge de dix ans. Dès la période des études, ils ne rêvaient que d'une vie où ils pourraient toujours rester ensemble, jusqu'à la mort. Mais, alors que Bernard avait de quoi vivre, Valentin dut gagner sa vie. Il décida donc d'entrer à l'École militaire de Saint-Cyr pour devenir officier dans l'Infanterie de marine, calculant que sa carrière, s'il allait aux colonies, ne durerait que dix-sept années. Dans l'estaminet où il avait convié son ami pour lui dire au revoir, ils se donnèrent rendez-vous dans dix-sept ans jour pour jour et à cinq heures et demi précises dans ce même estaminet; et ils se séparèrent.

Valentin fut affecté à Saint-Louis du Sénégal. D'abord, obsédé par le souvenir de son ami, il découragea tout le monde par  sa tristesse. Puis il décida de construire une maquette en relief de sa ville natale, en se fondant sur des cartes et ses souvenirs.
Il représenta Orléans avec sa ceinture de boulevards, ses rues, ses places, ses toits de tuiles et d'ardoises, ses églises, ses monuments, son large fleuve, son beau pont, sans oublier la vieille maison en colombage et à pignon où demeurait son grand ami Bernard. Il représenta la légèreté féérique des tours de la cathédrale, l'imposant beffroi entre les murs duquel séjourna Jeanne d'Arc. Puis, au-delà de la ville en amphithéâtre, on voyait les hauteurs de La Chapelle, les hauteurs de Saint-Loup, la belle avenue Dauphine, les hauts peupliers de la Mouillère, les bords du Loiret…

Après une longue attente de dix-sept années, ce fut pour Valentin l'embarquement pour la France et le chemin de fer de Paris à Orléans.

Au jour dit, à l'heure dite, il fut dans l'estaminet du rendez-vous. Mais Bernard ne vint pas. Le patron de l'établissement lui apprit qu'il était venu chaque jour s'asseoir à la même place, consumé de plus en plus par un ennui incommensurable, puis frappé d'une sorte de démence ; et qu'il était mort cinq jours plus tôt en laissant une lettre d'adieu dans laquelle il disait, avant de mourir, qu'ils avaient eu tort de concevoir cette combinaison égoïste.

Alors Valentin, frappé à mort, se dirigea vers la gare et prit un train pour Paris où il perdit connaissance. C'est dans ce train qu'on le retrouva, évanoui. On le transporta au Val-de-Grâce, où il raconta son histoire à un médecin avant de mourir.

 


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