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ZÉNOBIE

 

ZÉNOBIE BLESSÉE EST TROUVÉE MOURANTE SUR LES BORDS DE L'ARAXE

Rhadamiste, roi d'Ibérie, chassé par les Arméniens (dont il avait tué le roi), fut accompagné dans sa fuite, par Zénobie, sa femme alors enceinte. Comme elle ne pouvait le suivre, il la frappa de son cimeterre et la jeta dans l'Araxe. Elle fut recueillie par des bergers qui la guérirent et le conduisirent vers leur roi.

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Esquisse préparatoire par Merry-Joseph BLONDEL (1781-1853), Zénobie trouvée par des bergers sur les bords de l'Araxe, vers 1812 [Le tableau définitif, exposé au Salon de 1812, a été détruit à Saint-Malo par le bombardement d'août 1944].

Un berger pose une main sur le coeur de Zénobie et fait signe qu'elle respire encore à un autre berger, plus jeune, qui se penche avec intérêt vers elle. Un vieillard regarde la scène.

TACITE, Annales, XII, 50-51
Vacuam rursus Armeniam Radamistus invasit, truculentior quam antea, tamquam adversus defectores et in tempore rebellaturos. Atque illi quamvis servitio sueti patientiam abrumpunt armisque regiam circumveniunt. Nec aliud Radamisto subsidium fuit quam pernicitas equorum, quis seque et coniugem abstulit. Sed coniunx gravida primam utcumque fugam ob metum hostilem et mariti caritatem toleravit; post festinatione continua, ubi quati uterus et viscera vibrantur, orare ut morte honesta contumeliis captivitatis eximeretur. Ille primo amplecti adlevare adhortari, modo virtutem admirans, modo timore aeger ne quis relicta poteretur. Postremo violentia amoris et facinorum non rudis destringit acinacen vulneratamque ripam ad Araxis trahit, flumini tradit ut corpus etiam auferretur: ipse praeceps Hiberos ad patrium regnum pervadit. Interim Zenobiam (id mulieri nomen) placida in eluvie spirantem ac vitae manifestam advertere pastores, et dignitate formae haud degenerem reputantes obligant vulnus, agrestia medicamina adhibent cognitoque nomine et casu in urbem Artaxata ferunt; unde publica cura deducta ad Tiridaten comiterque excepta cultu regio habita est. Voyant l'Arménie abandonnée, Rhadamiste y rentra plus terrible que jamais : il avait une rébellion à punir, et il en craignait une nouvelle. En effet, les Arméniens, quoique faits à la servitude, éclatèrent enfin, et coururent en armes investir le palais.  Rhadamiste n'eut d'autre ressource que la vitesse de ses chevaux, sur lesquels il s'enfuit accompagné de sa femme. Celle-ci était enceinte : toutefois la crainte de l'ennemi et la tendresse conjugale lui donnèrent des forces, et elle supporta le mieux qu'elle put les premières fatigues. Bientôt, les continuelles secousses d'une course prolongée lui déchirant les entrailles, elle conjure son époux de la soustraire par une mort honorable aux outrages de la captivité. Rhadamiste l'embrasse, la soutient, l'encourage, passant tour à tour de l'admiration pour son héroïsme à la crainte de la laisser au pouvoir d'un autre. Enfin, transporté de jalousie, habitué d'ailleurs aux grands attentats, il tire son cimeterre, l'en frappe, et, l'ayant traînée au bord de l'Araxe, il l'abandonne au courant du fleuve, pour que son corps même ne puisse être enlevé. Pour lui, il gagne précipitamment les États de son père. Cependant Zénobie (c'était le nom de cette femme) flotta doucement jusque sur la rive, respirant encore et donnant des signes manifestes de vie. Des bergers l'aperçurent ; et, jugeant à la noblesse de ses traits qu'elle n'était pas d'une naissance commune, ils bandent sa plaie, y appliquent les remèdes connus aux champs ; ensuite, instruits de son nom et de son aventure, ils la portent dans la ville d'Artaxate. De là elle fut conduite, par les soins des magistrats, à la cour de Tiridate, qui la reçut avec bonté et la traita en reine.

L'intérêt pour ce sujet, jadis traité par Poussin (Saint-Pétersbourg, musée de l'Ermitage), a été renouvelé au siècle des Lumières par une tragédie de Crébillon fils, créée en 1711.


Pour comparaison :

William Adolphe BOUGUEREAU (1825-1905) Zénobie trouvée par les bergers sur les bords de l'Araxe, 1850, Musée d'Orsay.


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