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DROIT D'ASILE FAVORABLE AUX MALFAITEURS

En France, le droit de trouver asile dans les églises a été supprimé en 1539 par l'ordonnance de Villers-Cotterêts. Mais, en Italie, ce droit d'asile perdurait et permettait aux malfaiteurs de s'installer à demeure dans les églises, d'où il pouvaient impunément continuer leurs méfaits.

LABAT
[A Tivoli] il y a un abus des immunités des églises et des chapelles. La retraite qu'elles donnent aux criminels est un revenu pour elles, et surtout les chapelles des Confrairies, qui ne manquent jamais d'avoir deux ou trois chambres et une cuisine pour le service de ces misérables. Et comme il est défendu, sous peine d'excommunication, d'empêcher qu'on ne porte des vivres et autres nécessités à ceux qui sont ainsi retirés, ils y demeurent tant qu'ils veulent et jusqu'à ce que leurs affaires soient accommodées ou qu'ils se soient sauvés en des pays de sûreté. Comme tout le monde peut avoir besoin de cet asile, on ne saurait croire avec quelle opiniâtreté les ecclésiastiques et les séculiers défendent ces pernicieux privilèges, quoiqu'ils ne connaissent que trop souvent, et à leurs dépens, l'abus et le mauvais usage qu'on en fait. On peut assurer, sans crainte de se tromper, que de cent assassinats qui se commettent en Italie, il y en aurait quatre-vingt-dix-huit qui ne se feraient pas s'il n'y avait point de retraite dans des lieux privilégiés.

BOUCHARD
A Naples, des malfaiteurs, s'ils étaient beaux garçons, avaient coutume de recevoir dans les églises des hommes en quête d'aventures, les transformant en maisons de passe pour homosexuels. [À Naples] il y a toujours un bon nombre de malfaiteurs retirés qui boivent, mangent et couchent dans l'église, […] là où ils font mille vilenies et insolences. Entre autres je vis une fois dans Santa-Maria-Rotonda deux ou trois jeunes gens assez beaux garçons, où les cavaliers napolitains allaient comme au bordel. Et y vis une fois en passant, dans le bénitier, que je considérai pour être un trépied fort antique, des bouteilles de vin que ces messieurs avaient mis rafraîchir dans l'eau bénite.

• Labat (Jean-Baptiste), Voyages du P. Labat, de l'ordre des FF. Prêcheurs, en Espagne et en Italie, tome IV, Amsterdam, 1731, p. 20.
• Bouchard (Jean-Jacques), Journal, II, Voyage dans le royaume de Naples. Voyage dans la campagne de Rome, Turin, 1977, p. 397.