BROSSES
A Venise, pour toute femme mariée il est de règle qu'il y ait un amant ; ce serait même une espèce de déshonneur à une femme si elle n'avait pas un homme publiquement sur son compte. […] Il faut cependant rendre justice à la vérité ; notre ambassadeur me disait, l'autre jour, qu'il ne connaissait pas plus d'une cinquantaine de femmes de qualité qui couchassent avec leurs amants. Le reste est retenu par la dévotion. Les confesseurs ont traité avec elles qu'elles s'abstiendraient de l'article essentiel, moyennant quoi ils leur font bon marché du reste, tout aussi loin qu'il puisse s'étendre, y compris la permission de n'être pas manchotes.
MISSON
A Venise, on met ordinairement les filles au couvent dès l'enfance et on conclut leurs mariages sans qu'elles le sachent ni que, bien souvent même, elles aient vu leur futur époux. […] L'usage des concubines est tellement reçu que les plupart des femmes vivent en bonne intelligence avec leurs rivales, et c'est ainsi que les homme remédient aux défauts personnels des filles qu'ils épousent. […] Le libertinage à l'égard des femmes est tourné en coutume si grande et générale qu'à dire naïvement la chose on a oublié et anéanti tout sentiment de péché sur cela. |
• De Brosses (Charles), Le président de Brosses en italie, Lettres familières écrites d'Italie en 1739 et 1740, 2e éd., t. I, 1858, p. 175-176 : lettre à M. de Blancey, 14 août 1739.
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Misson (Maximilien), Nouveau voyage d'Italie fait en l'année 1688, t. I, 5e éd., Utrecht, 1722, p. 236. |