Charles Barbara
LA RONDE FANTASTQUE
RÉSUMÉ :
Il était minuit, j'étais déguisé pour le carnaval et j'attendais la belle mais impénétrable Johanna, qui était en retard. Alors que j'étais dans mon fauteuil devant le feu, des pensées bizarres, des images de formes mystiques m'envahirent l'esprit.
Alors Johanna parut. Épouvanté, je découvris une Johanna fantastique, munie de deux ailes, un ange terrifiant qui, passant à travers le plafond, m'entraîna, à cheval sur son dos, cramponné à ses cheveux. À travers pluie et vent, nous avons fait le tour de Paris, puis nous nous sommes élevés. Mon habit blanc disparaissait sous un fouilis de diverses plantes qui, lorsque je voulus m'en débarrasser, se transformèrent en oiseaux nocturnes immondes qui s'attachèrent à moi, puis s'éloignèrent avec un cri sinistre.
Je m'aperçus alors que j'avais la possibilité de voir à travers les murs et de découvrir Paris et ses cent mille existences : salles splendides des riches et asiles lugubres des miséreux, fous joyeux et moribonds misérables.
Un vieil astronome de l'Observatoire nous aperçut, moi et l'ange, et se demanda si nous étions une comète, un météore igné ou une fraction d'étoile; et il prépara un mémoire pour l'Académie des Sciences. Je vis dans un bouge des enfants avec leur ivrogne de père, une mère qui veillait son enfant agonisant, un assassin égorgeant un promeneur, des héritiers se disputant près du cadavre encore chaud du testateur.
Je vis des savants fous qui voulaient bouleverser la chimie, prouver que le soleil tourne autour de la terre, démontrer la quadrature du cercle. Je vis un vieux savant qui, désespéré, mourut juste avant d'avoir pu révéler le secret des hiéroglyphes égyptiens qu'il venait de découvrir.
Décidément l'ange avait le dessein de me faire prendre la vie en dégoût : il me montra Johanna qui, telle une bacchante, se donnait à tous en me tournant en dérision auprès de mes amis.
Profondément blessé, je voulus mourir. Alors l'ange me laissa tomber… et je me suis réveillé : j'avais rêvé, Johanna n'était pas venue. Mais je me persuadai que tout n'était pas mensonge dans mon rêve.