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Charles Barbara

ARY ZANG

paru dans le Journal pour tous, 2, 6, 9, 13, 16, 20, 23, 27, 30 mai 1863

publié chez Hachette en 1864


 

RÉSUMÉ :

Dans un village au nord de l'Inde, près de la rivière Sind(h), vivait Ary Zang, un garçon d'une vingtaine d'années. Vers l'âge de treize ans, il avait fait, dans la capitale du pays, de bonnes études qui avaient développé son talent naturel pour la poésie. À la mort de ses parents, il était revenu chez lui, près de sa fiancée, la petite Bibi-Djane, la fille de Mahmoud. Mais la vie à laquelle il était promis lui paraissait bien terne et décevante au regard de celle à laquelle il aspirait. C'est pourquoi il décida de tout quitter et de gagner la capitale, muni seulement de ce qu'il avait d'or et de hardes.

Sur le long chemin menant de son village à la ville, il rencontra un pauvre diable laid et affamé, avec lequel il partagea son déjeuner. Il était Arménien et s'appelait Stéphan. Celui-ci profita du sommeil de Ary Zang pour lui dérober tous ses biens. Démuni, Ary Zang fut recueilli par une troupe de marchands qui l'aidèrent à atteindre la grande ville après trois mois de marche.

Le premier soir, dans la foule, il fit trois rencontres. Il remarqua d'abord une femme, une Géorgienne, qui insultait un vieillard vêtu de guenilles : elle venait de reconnaître Ibrahim, le riche usurier qui l'avait ruinée et contrainte à vendre dans la rue ses derniers biens. Puis son attention fut attirée par un couple : Faramour et sa femme, lui hideux, elle laide et méchante. Puis apparut, accompagnée d'un imposant cortège, la fille du prince Karoun, la toute belle Lila : touchée par la détresse de la Géorgienne, elle lui fit porter une bourse pleine d'or, ce qui lui valut les ovations de la foule.

Ébranlé par ce qu'il avait vu, Ary Zang décida de tout faire pour devenir riche et puissant et pour conquérir la cœur de la belle princesse.

Alors qu'il errait dans la nuit, Ary Zang passa devant la boutique d'un tailleur, Mustapha. Par la porte entrouverte, il le vit et l'entendit qui gesticulait comme au théâtre en hurlant devant quelques mannequins. Il comprit que le tailleur, qui se croyait un talent d'acteur, mimait l'horrible dénouement d'un drame dans lequel un roi légendaire poignarde d'abord son rival puis sa propre femme. Il joua alors à entrer dans la pièce, mais Mustapha, toujours conquis par son personnage, le menaça avec le couteau qu'il tenait à la main. Ary Zang ne fut sauvé que par l'intervention de l'épouse et des deux filles qui ramenèrent l'homme à la raison. Dès lors, une vive sympathie naquit entre eux. Mustapha lui raconta comment il avait, dans sa jeunesse, rompu avec son père pour faire du théâtre, avec l'ambition de créer un théâtre nouveau, et comment, après une scène particulièrement violente dans une représentation devant la Cour, il avait dû renoncer, se marier et accepter la condition de tailleur.

Décidé à aider Ary Zang, Mustapha lui conseilla de faire calligraphier un de ses poèmes par un scribe, ce qui lui permettrait d'être admis parmi les lettrés du prince. Et il lui parla de ce prince qui, plus riche et plus puissant que le roi, vivait dans un palais magnifique, près duquel étaient deux harems et une sorte de forteresse mystérieuse dans laquelle logeaient les filles du prince.

C'est chez Ibrahim que Ary Zang trouva à se loger, persuadé, bien à tort, que la Géorgienne avait menti en parlant de son immense richesse et que cet Ibrahim n'était qu'un pauvre brocanteur sans le sou.

Puis, au cours de ses errances dans la ville, Ary Zang reconnut l'horrible Faramour. Celui-ci, qui semblait tout savoir de lui et qui avait compris quelles étaient ses ambitions, lui conseilla d'avoir recours au calligraphe Isaac, qui demanderait bien sûr pour sa peine 150 pièces d'or. Pour les gagner, Ary Zang pourrait entrer dans un complot visant à s'emparer les biens d'Ibrahim, qui, selon Faramour, était réellement un usurier devenu immensément riche par toutes sortes de malversations. Comme Ary Zang, comme locataire, avait la clef de la maison d'Ibrahim, il pourrait permettre aux bandits d'y pénétrer. Ary Zang, toujours désireux de s'enrichir pour pouvoir avoir accès au palais, fut tenté par cette proposition.

Dans un cabaret, il retrouva Stéphan, celui qui l'avait dépouillé de son or. Il était toujours sans ressources et Ary Zang eut la faiblesse de lui pardonner et de lui donner une pièce d'or.

Ary Zang révèla à Ibrahim que des bandits, sachant qu'il possèdait dans ses caves d'immenses richesses, se proposaient de s'en emparer. L'émotion d'Ibrahim le persuada que ce que lui avai dit Faramour est vrai, en dépit de la misère apparente dans laquelle il vivait. Et Ibrahim confirma que ses trésors étaient dissimulés non seulement dans sa demeure mais en bien d'autres domiciles. Alors Ary Zang lui suggèra de faire sortir l'or enfoui dans sa demeure principale en usant d'une porte secrète ouvrant sur des ruelles peu fréquentées.

Grâce à son ami Mustapha, Ary Zang a pu, comme lettré, avoir un logement dans une tourelle du palais, non loin de la citadelle mystérieuse d'où sortaient d'horribles cris et de laquelle, la nuit, on évacuait des cadavres.

Et Mustapha lui révéla la vérité. Le prince avait eu de ses sept femmes sept filles qu'il avait décidé de laisser grandir sans aucune contrainte, en pleine liberté. L'aînée, Khaula, se laissait vivre dans une apathie totale. La cadette, Touty, passait ses journées en vaines paroles. Fatima élevait toutes sortes de bêtes. Zoreth, véritablement folle, exigeait que s'assomplissent en sa présence tortures et meurtres. Seule Lila, celle qu'il avait aperçus le premier jour,  avait été élevée à la vieille mode et était une fille normale, aimant la peinture, la musique, la poésie et passionnée d'astronomie.

C'était elle, vraisemblablement, qui avait fait parvenir à Ary Zang un billet : « O poète ! les yeux d'une femme se sont ouverts sur ton infortune : espère ! » Fou d'amour, Ary Zang se persuada que, pour la séduire, il lui faudrait d'abord devenir riche. Espérant qu'Ibrahim pourrait lui avancer des sommes considérables, il continua à l'aider dans le projet de faire sortir ses richesses de sa demeure. Pour cela, il ne cessa d'espionner le viel usurier et prit l'empreinte de toutes ses serrures.

C'est alors qu'Ary Zang fut invité aux noces de la fille aînée de Mustapha qui devait épouser un émoucheur du palais, le fils du gros Saly, un homme de la maison du prince. Mais, avant la cérémonie, Mustapha, désespéré, vint annoncer qu'on venait de lui voler par ruse la dot de sa fille et tous ses bijoux. Saly n'en crut rien et pensa que c'était là une machination pour rompre le mariage. Ary Zang, persuadé que le voleur était l'habile Faramour, alla discrètement le rencontrer. Il lui dit que, par ses soins, tout était prêt pour l'attaque de la maison d'Ibrahim, à minuit, le premier jour de la nouvelle lune ; mais que, en échange, Faramour devait venir restituer à Mustapha tout ce qu'il lui avait volé. Ce qui fut fait ; et la noce put aller jusqu'à son terme.

Mal inspiré, Ary Zang profita du renom qu'il avait à la Cour pour intercéder en faveur de l'Arménien Stéphan.

Toujours amoureux de la princesse Lila, il comprit un jour que, de la fenêtre de sa chambre du palais, il pouvait voir une fenêtre close, celle de l'appartement de Lila. Puis, alors qu'il essayait, à l'aide d'un téléscope, de voir à travers le store, il s'aperçut que la jeune femme le regardait avec un téléscope identique. Dès lors ils communiquèrent à l'aide de calligraphies : c'est bien elle qui, amoureuse de ses dons de poètes, lui avait fait porter un message lui disant d'espérer. Persuadé qu'il pourrait un jour épouser la belle princesse, Ary Zang se conforta dans l'idée qu'il devait désormais tirer d'Ibrahim toute la fortune indispensable.

Le plan conçut  par Ary Zang était sur le point d'aboutir : Ibrahim avait pu faire sortir ses trésors par la porte secrète ; il ne restait qu'un bahut plein d'objets hétéroclites. Il fallait maintenant, juste avant l'irruption des hommes de Faramour, mettre le feu à la maison à l'aide des produits incendiaires qu'il y avait accumulés. Ce qui fut fait. Et Faramour ne put que reconnaître qu'un jeune poète avait été, cette fois, plus malin que lui.

Séduite par l'homme avec lequel elle ne communiquait que par téléscopes interposés, la princesse Lila devint amoureuse ; le prince, qui avait, lui, le projet de la marier avec un des neveux du roi, s'en inquiéta et, furieux, décida de trouver et d'éliminer celui qui avait ensorcelé sa fille. Stéphan, qui faisait désormais partie des espions du palais, réussit à découvrir le coupable. Ary Zang, enchaîné, fut amené devant le prince lors d'une fête au palais à laquelle assistaient la babillarde Touty, la féroce Zoreth et Fatima qui, pour se distraire, s'empara d'un négrillon et le fit dévorer par quelque animal féroce. Ary Zang lui-même devait ce jour-là à servir de pâture à un tigre.

Promis à une mort imminente, Ary Zang comprit que son amour pour Lila n'avait été inspiré que par la vanité et il regretta d'avoir quitté la douce Bibi-Djane pour des chimères. Il pleura et, pendant que Fatima retenait à grand peine le tigre altéré de sang, son émotion lui dicta une sorte d'hymne qui impressionna les spectateurs. C'est alors qu'on vit apparaître Lila qui menaçait de se tuer si on touchait un seul des cheveux de l'homme qu'elle aimait. Le prince, malgré lui, promit à sa fille qu'il aurait la vie sauve, bien décidé à trouver d'autres moyens de se venger.

Après avoir été attaché à un poteau et livré aux insultes de la foule, Ary Zang fut attaché sur un âne et promené dans la ville dans un équipage grotesque, un écriteau précisant que trois mille pièces d'or étaient offertes à qui produirait un témoignage contre lui. Le cortège passa devant le scribe Isaac, puis devant Faramour, enfin devant Mustapha. Malheusement il croisa aussi la route du vieil Ibrahim qui, ne pouvant résister à la promesse des trois mille pièces d'or, se souvint d'un pamphlet dont Ary Zang était l'auteur et le dénonça. Un tribunal le condamna, non pas à être exécuté (à cause de la promesse faite par le prince à sa fille), mais à une peine particulièrement cruelle : pendant plusieurs années s'il le fallait et aussi longtemps qu'il pourrait résister, un bourreau le fouetterait jusqu'au bord de la mort ; puis un médecin lui rendrait ses forces ; alors on le fouetterait à nouveau, le médecin intervenant jusqu'à ce qu'il meure d'une mort « naturelle ».

Dans le cachot où on l'enferma, Ary Zang trouva un compagnon d'infortune, un homme de son âge qui était une sorte de sosie. Il s'appelait Muraour, était marchand d'étoffes et avait été injustement accusé et condamné à mort pour avoir assassiné un oncle dont il devait hériter. Quand Ary Zang lui raconta son histoire, Muraour affirma qu'il craignait tant la mort brutale qui le menaçait qu'il préfèrerait être soumis au long supplice promis à Ary Zang. Alors celui-ci lui proposa d'échanger leur nom et leurs habits, ce qu'ils firent. Et quand le bourreau vint prendre Muraour, c'est Ary Zang, décidé à mourir, qui fut conduit au supplice.

En réalité, ce n'est pas vers une potence qu'on l'amena, mais devant un juge, qui annonça au faux Muraour que l'on avait trouvé le véritable assassin de son oncle, qu'il était libre et qu'il pourrait bientôt entrer en possession de son héritage. Faisant taire ses scrupules de conscience, Ary Zang adopta  sa nouvelle identité et s'installa dans la demeure et le magasin de Muraour, rue des Ramiers.

Agissant avec prudence, le faux Muraour put tromper ses voisins marchands. Il se défiait surtout de Faramour qu'il voyait rôder devant les boutiques. Un jour Stéphan le découvrit et s'étonna de sa ressemblance avec cet Ary Zang qu'il avait fait enfermer dans la prison du prince. Il raconta qu'après avoir fait condamner l'amant de la princesse, il avait été chassé du palais. Ary Zang, sans se dévoiler, fut enclin à lui pardonner. Il se présenta comme l'héritier de son oncle Muraour et le gratifia d'une pièce d'or.

Quand Ibrahim vint dans la boutique, après s'être étonné de la ressemblance du marchand avec Ary Zang, ce fut pour réclamer le montant des billets qu'avait souscrits Muraour avant son affaire et qu'il avait rachetés à très bas prix. Ary Zang dut promettre de payer, malgré des conditions exorbitantes imposées par l'usurier.

Un jour qu'il se morfondait dans son magasin, il vit arriver une femme voilée, accompagnée d'un cortège de mules. Elle se présenta comme la princesse Fidzikukula, désespérée après la perte du beau prince qu'elle idolâtrait et auquel Ary Zang ressemblait beaucoup. Elle avait un visage étonnamment peint de maquillages multicolores et le corps couvert de bijoux clinquants. Elle invita le faux Muraour à partager avec elle une abondante collation. Après avoir bu trop de vin, Ary Zang tomba en léthargie pendant plusieurs heures. À son réveil, il constata que toutes les étoffes du magasin avaient disparu, ainsi que les bijoux, les miroirs, les parfums. La « princesse » n'était que l'horrible femme de Faramour, lequel avait réussi à s'emparer de tout le contenu de la boutique.

Heureusement, le même jour, Ary Zang récupéra l'héritage de Muraour et devint riche.

Un jour, Ary Zang reconnut dans la foule un homme qui, sous une pelisse noire, était vêtu de rouge : c'était le bourreau. Il lui expliqua qu'un de ses camarades vivait dans le remords, car il se trouvait jouir de la fortune d'un homme honnête qui, en prison, était flagellé presque chaque jour ; ces remords, dit-il, le rendaient incapable de jouir des richesses mal acquises. Il irait mieux sans doute si le bourreau acceptait, comme simulacre d'un châtiment, de lui couper un doigt : un cimetère orné de diamants serait son salaire. Le bourreau, le prenant pour un fou, refusa. Furieux, Ary Zang jura qu'il allait « lui tailler de la besogne ».

Dans les mois qui suivirent, famine, peste et tremblement de terre avaient fait fuir tous les notables, les fonctionnaires et même le prince Karoun. Le peuple s'était soulevé et avait pillé les quartiers riches de la capitale. Ary Zang, sous le nom de Muraour, rassembla une centaine de cavaliers avec lesquels il massacra les révoltés. Puis il s'appliqua à soulager les pauvres et à rendre la vie à la ville. C'est ainsi que le peuple reconnaissant le choisit comme dictateur, avec l'accord de la France, de l'Angleterre et de la Russie.

Alors que, dans le palais, il débattait avec ses conseillers des moyens de gouverner, les anciens gardes du prince, nommés les « cuirasses d'argent », exigèrent de reprendre leur fonction, écartant les volontaires qui avaient aidé le nouveau ministre à prendre le pouvoir. Ary Zang réagit en faisant décapiter  leur capitaine par le bourreau.

Ses premières décisions furent ensuite de charger l'espion Stéphan de surveiller étroitement Ibrahim et de faire nommer le tailleur Mustapha titulaire d'une chaire de déclamation au collège royal, avec une première gratification de mille pièces d'or. Il espérait ainsi racheter le remords qu'il avait d'avoir volé la fortune d'un homme qui était supplicié à sa place.

Puis il se concilia l'armée en entretenant et en payant les soldats grâce à la vente des immenses domaines de la succession Muraour. En maître absolu, il libéra les prisonniers  politiques, sauf le pauvre Muraour, et prit à son service, comme lieutenant, un jeune émigré turc, Foafi.

Pour réduire l'influence des calligraphes, il développa l'imprimerie.

Puis il s'occupa d'Ibrahim et de ses immenses richesses, réparties dans une vingtaine de maisons de la ville (Stéphan lui apprit à cette occasion qu'Ibrahim avait une fille). Son plan était d'investir simultanément chacune des vingt maisons et de s'emparer d'Ibrahim, l'usurier honni de tous, afin de le faire comparaître devant ses juges. Ceux-ci, négligeant la foule des délits dont il s'était rendu coupable dans sa vie, l'accusèrent d'avoir, six ans plus tôt, mis le feu volontairement à sa maison et, comme témoin à charge, on amena le faux Ary Zang, c'est-à-dire Muraour, épuisé par des années de tortures. Ibrahim fut condamné à mort et tous ses biens confisqués au profit du trésor public. Ému par l'intervention de la fille d'Ibrahim, Ary Zang commua sa peine en prison perpétuelle.

Un jour le prince revint. Mal accueilli par le peuple, il fit d'abord bon visage à son nouveau ministre, ce qui encouragea Ary Zang dans son projet d'épouser Lila. Mais Stéphan, bien informé, lui conseilla de se méfier du prince.

Le cours de déclamation de Mustapha déchaînait les passions, dans la mesure où il proclamait qu'une liberté absolue était en tout nécessaire. Comme il lui arrivait de citer des vers de son ami Ary Zang, le poète génial qui, rappelait-il, croupissait en prison, il suscita une émeute entre les jaunes, partisans du prince, et les bleus, partisans du nouveau ministre. Une véritable guerre civile s'ensuivit. Pour tenter d'y mettre fin, Ary Zang envoya Foafi en ambassade auprès du prince, lui offrant, en gage de paix, de donner au ministre sa fille Lila. Celle-ci, croyant que la demande venait de Muraour, refusa catégoriquement et Foafi revint vers son maître la corde au cou.

Alors Ary Zang décida de lancer ses « cavaliers de la mort » à l'assaut des « cuirasses d'argent du prince ». Ce fut une horrible tuerie, à l'issue de laquelle le vieux prince fut vaincu, capturé, jugé et poignardé par le bourreau. Tous ses biens servirent à remplir les coffres du trésor. Ses deux filles, la grosse Khaula et Fatima la dompteuse, devinrent des attractions dans les foires d'Europe. Lila, mise aux enchères, fut achetée par Foafi et placée dans le harem du ministre. Quant à Muraour, il mourut dans sa prison, toujours sous le nom de Ary Zang, le grand poète. Mustapha fut chargé d'organiser de luxueuses obsèques et d'ériger un tombeau grandiose pour recueillir la dépouille de l'immense poète. C'est ainsi que, incognito, Ary Zang assista à ses propres funérailles.

Alors que la princesse Lila s'était renfermée dans le palais, Ary Zang se fit reconnaître d'elle : il était l'homme qu'elle avait considéré comme son amant. Mais elle le repoussa avec mépris.

Ayant soudoyé une femme qui était au service de la princesse, Çadoul, sous l'apparence d'une vieille femme, réussit à s'introduire chez Lila pour lui proposer de se venger de Ary Zang. Elle accepta et lui confia un portrait d'elle-même. Au sortir du palais, Çadoul fut suivi par l'espion Stephan, qui lui proposa de prendre sa part dans la conspiration qui se tramait : en effet, il voulait « sa part du gâteau ».

Le lendemain Çadoul, travesti en courrier, aborda Foafi. Celui-ci se laissa persuader qu'il devait venger la princesse ignoblement persécutée, qu'il en serait récompensé puisqu'elle avait juré de ne rien refuser qui celui qui la vengerait.

C'est une initiative de Ary Zang qui donna aux conjurés l'occasion d'agir. Il décida un soir d'aller dans les rues, incognito, pour constater l'état de son empire. Lui qui vivait dans l'illusion d'avoir agi au mieux des intérêts de son peuple découvrit partout des misérieux, des mendiants vivant dans un véritable enfer. Tandis qu'il s'avançait dans les rues en distribuant des pièces d'or, il prenait conscience de son échec. Alors il croisa Faramour et d'autres bandits qui le conduisirent en prison.

Foafi, secondé par Lila,  s'empara du pouvoir  et proclama la déchéance du ministre « Muraour ». La foula acclama Foafi comme son nouveau chef. Faramour et ses compagnons furent tous pendus.

Finalement le faux Muraour fut relégué dans une île lointaine de la mer Rouge. Un jour il vit arriver Mustapha, épuisé par son long voyage. C'est ainsi qu'il apprit que, Foafi étant mort, des hommes venaient pour le tuer. Ary Zang prit la fuite, se cacha dans une caverne. Là il découvrit que parmi les assassins se trouvait  Stéphan, qui voulait se venger de l'homme « qui lui avait fait du bien ».

Alors Ary Zang fit un retour sur lui-même et comprit la vanité de tout ce qu'il avait entrepris pour de vaines satisfactions d'amour-propre. Il se mit en route pour revenir dans son pays et retrouver Bibi-Jane et le vieux Mahmoud, vingt ans après les avoir quittés.

Il épousa Bibi-Jane qui lui donna des enfants qu'il éduqua pour en faire de « braves gens », mais sans les empêcher de faire, comme leur père, de nouvelles expériences.


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